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| 25.01.2012 | POPULAIRE - AZE KOKOVIVINA, SORCIER DU FOU RIRE ET PRETRE VAUDOU |
| | AZE KOKOVIVINA, SORCIER DU FOU RIRE ET PRETRE VAUDOU |  |
| AZE Le grand Comedien du togo
ankanou Mawuélomi dit azé Kokovivina (photo) est un homme de renom au Togo grâce au théâtre populaire, le concert-party dont il est devenu le maître incontestable et incontesté depuis la mort de Kokouvito. Aborder l’homme est aisé. Il n’a pas la grosse tête. Il a l’air jeune malgré la cinquantaine révolue. Azé arrive avec son sourire, son rire et crée une atmosphère totalement détendue. Du haut de ses 1m70, il est très sûr de lui-même, ponctuel, il est un grand accro du téléphone portable. Chaque 10 minutes, il a quelqu’un au bout du fil et s’excuse pour le dérangement. Il est fier de son parcours artistique, même s’il trouve qu’il reste beaucoup de choses à faire. Entretien, confidences et révélations avec l’humoriste devenu prêtre vaudou sur sa vie, son parcours artistique et ses dieux - exclusivité Togocultures..
Azé Kokovivina le comique
Le récit de la vie de Mawuélomi est une truculente histoire, un roman intéressant de 400 pages qu’on dévore en moins de 2h. Connaitre sa date exacte de naissance n’est pas une culture ancrée dans la tradition togolaise. Si ses parents ont réussi la prouesse à la veille de l’indépendance de lui faire délivrer son acte de naissance, c’est compter sans l’incendie qui a croqué ces papiers sans lesquels tu existes sans exister.
Ainsi, l’enfant est présenté à un maître d’école de son village natal Agomé-Glozou dans la préfecture des Lacs (aujourd’hui rattaché à la préfecture du Bas-Mono). L’enseignant le scrute intrigué et lui demande de passer un de ses bras sur sa tête jusqu’à toucher l’oreille. L’enfant s’exécute. Puis l’enseignant proclame « Il est né en 1960, il a 9 ans. Il peut commencer l’école ». Aujourd’hui le passeport de Mawuélomi Adankanou dit Azé Kokovivina porte la date du 31 décembre 1960 à Agomé-Glozou. Sa scolarité dure six ans (1969-1974), partagée entre Agomé-Glozou et Afagnan, sans être sanctionné par un certificat.
N’Kpényaglo et Mawuélomi
Si administrativement, l’histoire est aussi simple, humainement, c’est une profonde déchirure pour cet enfant qui n’aurait peut-être jamais vu le jour. Ses six premiers frères et sœurs sont décédés précocement et il n’a jamais vu une seule de leur photo. Quand sa sœur est née, la famille s’apprêtait encore à l’enterrer, ils ont réalisé qu’elle est toujours en vie. Sa tante l’a nommée au bout du 7e jour : « N’Kpényaglo », traduit littéralement « Ma honte est dépassée. Dieu a eu pitié de nous en laissant la 7e enfant ». Le 8e enfant survivra aussi et cette fois-ci le père le baptise « Mawuélomi », « C’est Dieu qui nous a aimés en nous laissant encore cet enfant ».
C’est une histoire tragique mais avec des relents mystiques et mystérieux. Puisque plus tard, Mawuélomi découvre que son père et sa mère ne pourront jamais avoir d’enfants ensemble sans la main mystérieuse d’un vieux prêtre vaudou, ami de son père. Son être avant et après sa naissance va être imbibé dans le vaudou. Le vaudou, c’est son origine, son histoire et sa vie.
Azé kokovivina, hasard d’une vie
Azé Kokovivina le Chancelier de l’humour
Quand Adankanou Mawuélomi débarque à Lomé en 1971 pour 3 mois et définitivement en 1977, il n’a jamais imaginé et personne n’a soupçonné qu’il sera un Homme éclairé par la vie et que son soleil sera au zénith à tout instant de la vie. Il est soumis à différents apprentissages, bijouterie, menuiserie, etc. Azé innove, il crée une guitare avec le bois et les freins de vélo qu’il jouait et vendait pour survivre. Il est ouvrier à CFAO où il décharge les camions de marchandises, le jour. La nuit, il joue sa guitare dans le quartier de Papa Gally à Afagnankomé en allant vers Bassadji, un quartier de Lomé. Un soir, l’animateur de "Bonsoir le Togo" à Radio Lomé, Fo Djifa Adamah, le repère, séduit par sa guitare et sa fibre comique. Il l’invite au studio de Radio Lomé à son émission.
Sa réussite n’est forcément pas liée à son talent mais au hasard. La famine et le manque de soutien au village l’ont conduit à la capitale Lomé à la recherche d’un mieux être. L’échec de l’apprentissage et la débrouille !!! Le hasard d’une rencontre avec un journaliste, le hasard de l’absence du meilleur comédien de concert-party de l’poque, Kokouvito, à une émission radio au moment où le jeune Mawuélomi cherchait ses voies, le hasard de la confiance placée en lui par l’animateur pour remplacer le temps d’une émission Kokouvito ? Et voilà, le début de la carrière d’Adankanou Mawuélomi dit Azé Kokovivina. Il tire d’ailleurs Azé d’une partie de cartes où il a détrôné le meilleur à Afagnan en 1971. En bricolant avec le nom, il s’est forgé un bon nom d’artiste.
Azé kokovivina, réussite et mystère d’une vie
Azé Kokovivina et ses comédiens
L’homme de concert-party va de succès en succès. En 1985, il crée sa Compagnie « Azé Kokovivina Concert band » grâce à Brown, un ancien comédien de Happy Star Concert-band alors qu’il était vaguemestre à Brother Homé.
Repéré en 1986 par le dramaturge metteur en scène et directeur de la troupe nationale de l’époque, Sénouvo Agbota Zinsou, Azé prend le rôle de la Tortue chanteuse dans le spectacle La Tortue qui chante. La porte de l’Afrique et de l’occident s’ouvrent à lui. Il part en tournée en France, en Belgique, en Allemagne. Sa Compagnie Azé kokovivina Concert-band est au Festival de Limoges en 1990. Azé s’embarque sur les eaux de l’Oubangui, du Zaïre, du Congo et de la Centrafrique avec le projet BBKB du metteur en scène Guy Lenoir. En 1998, il se retrouve à la Foire Internationale de Bordeaux.
Le souvenir de ses périples donne un nouvel élan a ses personnages. Il revient de l’Europe avec des masques d’Halloween qui donnent une autre couleur à ses personnages de revenants. Au Togo, il joue dans les bars, les maisons des quartiers populaires et lors des veillées funèbres, rarement dans les centres culturels. En 2001, il est l’invité surprise du Festhef à Assahoun.
Son parcours riche est interrompu par les flammes. Malédictions ? Concours de circonstances ? Sa compagnie, revenant d’une tournée avec instruments de musique et costumes, a eu un grave accident avec un camion transportant de l’essence de contrebande. La troupe part en fumée à l’exception d’une personne. Quelques temps après, sa maison est dévorée par les flammes ! Il fallait reconstituer toute la troupe, acheter d’autres instruments de musique car sans musique, pas de concert-party.
Il refait difficilement surface dans un environnement togolais où la culture est entièrement ignorée. L’homme joue en français, ouatchi et en mina. Il anime des émissions radio sur le Fa, le concert-party et le vaudou. Il est aussi le secrétaire général adjoint des prêtres vaudous du Togo. Il a transcendé toutes ses souffrances. Azé va s’efforcer de bricoler une image qui confère finalement une cohérence à sa vie et lui permet de trouver son chemin, sa vraie image.
Les anecdotes de sa vie
Parler de la vie d’Azé, c’est aborder la souffrance sous différents angles, c’est aussi comprendre le fonctionnement d’un monde où l’envie fait basculer des vies entières. Souvent, on se pose des questions sur les forces négatives du vaudou exploitées par certaines personnes pour nuire. Si l’homme tient, il dit qu’il puise sa force dans ses dieux protecteurs.
L’envoûtement
Azé en communion avec ses dieux
Son enfance surgit dans sa mémoire comme un feu brûlant. Au CEI, au 2e jour de la composition du 3e trimestre, il voit de la cendre sur son banc. Il alerte son maitre qui lui demande de tout nettoyer et de s’asseoir. Seulement, dans l’après-midi il ne retrouve plus le chemin de sa classe. Il tourne autour de l’établissement jusqu’à ce qu’une connaissance informe son grand-père qui va le désenvouter. Il devient fébrile et son père après l’avoir préparé au vaudou prend la décision de l’envoyer poursuivre ses études à Afagnan à 10km d’Agomé- Glozou.
Mawuélomi qui a vu évoluer les échassiers a créé une troupe de jeunes échassiers à Afagnan. Il passe d’Aného à la Capitale Lomé, sollicité par les autorités pour des prestations. Ce qui finit par convaincre le jeune Adankanou à délaisser les bancs pour se lancer dans le métier artistique.
L’échassier et Aguè, le génie de la forêt
Azé Kokovivina le Grand prêtre vaudou
Il a souffert de sa réussite à l’école primaire et surtout d’Agué, le génie de la brousse. En 1976, pendant 5 mois, il est en proie aux maux de ventre et de tête, un mal qui a surgi après une rencontre avec un « fantôme ». Il allait ce jour-là à une surprise-party à la suite d’une prestation avec ses échassiers. L’histoire dit qu’après les jeux, il faut attendre la nuit avant d’enlever les échasses qui sont du domaine des Aguê. Azé a attendu la nuit. Pour aller à la surprise party, il fallait se débarrasser des échasses, suivre quelqu’un car la nuit est noire, proie des forces mystérieuses. Il attendait tranquillement dans l’obscurité, il entend les pas d’un homme, il se dit enfin. L’homme après l’avoir dépassé à commencer à grandir, à grandir presque jusqu’aux cieux puis a disparu de la vue du jeune homme. Azé a profité malgré cela de la nuit pour faire la fête avec ses copains.
Et un matin, le mal a surgi jusqu’à ce qu’il confesse avoir vu un fantôme. Après sa guérison par son grand père et les grands prêtres vaudous, la famine éclate dans le village et il a dû son salut à son départ pour Lomé.
Le comique et le Grand-Prêtre Vaudou
Azé Kokovivina et son Kelensi
Mawuélomi Adankanou dit Azé Kokovivina a été nourri au vaudou depuis le sein maternel. Son grand-père maternel l’a initié à 9 ans malgré les réticences de Mawuélomi qui avait plutôt une peur bleue des Légba et des images insupportables à ses yeux. Le vaudou explique-t-i,l est comme un couteau à double tranchant. Si tu ne respectes pas ses prescriptions, il peut te détruire. Il ira vers le vaudou avec le concert-party. Le travail d’imitation n’est pas aisé. Vous pourrez voir votre vie écourtée. La concurrence est rude et les tentations fréquentes. Il faut s’adjoindre la force des divinités protectrices. Azé a commencé véritablement à s’armer contre les mauvais sorts et les mauvais yeux. Puis, les esprits de sa grand’mère maternelle l’ont désigné. Il hérite avant la mort de celle-ci de ses divinités de son panthéon.
Il est attendu en France dans les prochains mois pour parler du vaudou et de sa force. Puisse les dieux qu’il adore l’accompagner dans sa nouvelle mission.
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